Blog Article


Nathanaël Negroni
Principal Consultant
Depuis quelques années, chez ZeTrace, nous accompagnons les acteurs du B2B dans leur transformation digitale, que ce soit pour moderniser leur commerce ou pour explorer de nouvelles opportunités business. Cette orientation s’est révélée pertinente, à en juger par le nombre croissant d’entreprises que nous avons aidées, allant de distributeurs B2B spécialisés à des retailers ou des industriels souhaitant élargir leur activité. Ces expériences nous ont permis d’élaborer un panorama clair des enjeux des acteurs B2B face aux défis du commerce digital et des sujets à traiter pour y répondre.
Les enjeux clés de la digitalisation B2B
Les enjeux de la transformation digitale varient selon la typologie de l’entreprise (distributeurs B2B vs retailers B2C vs pure players par exemple) et la typologie de leurs clients (TPE vs PME vs ETI vs Grands comptes).
Positionnons nous tout d’abord du point de vue du client et notamment de ses typologies d’achats.
Enjeux concernant les achats de classes A (Achats stratégiques de production) et B (Achats stratégiques récurrents et hors production)
En tant qu’entreprise cliente qui fait des achats de classe A, comment est-ce que je peux trouver le partenaire le plus fiable, capable de me soutenir dans l’exécution de mon business avec le plus haut niveau d’exigence !
L’enjeu pour l’entreprise « fournisseur » est ici d’optimiser le parcours client pour garantir l’efficacité et construire une relation de partenariat. Pour ce faire, l’entreprise doit répondre à ces grandes questions :
Avant la contractualisation, comment est-ce que je donne des gages de fiabilité à mon client au travers d’une information claire, complète et facilement accessible ?
Comment est-ce que je donne un accès anticipé à mon client à mon offre à venir, parfois à l’étape d’un prototype ? Comment est-ce que je personnalise et humanise la relation qui mènera à la signature du contrat avec le bon équilibre en digitalisation et proximité humaine ?
Comment est-ce que je facilite les processus de création de devis, de réponse à appel d’offres, de contractualisation alors qu’il y a parfois autant de modes de fonctionnement que de clients à servir ?
Comment est-ce que je facilite un processus d’achat, souvent de gros volumes récurrents, à faire livrer dans différents points, avoir le bon niveau de stock pour garantir la bonne promesse de livraison pour éviter que mon client aille voir ailleurs ?
Comment est-ce que je suis capable de m’intégrer (offres, produits, commandes, …) facilement avec les systèmes de mes clients, aussi variés soient-ils ?
Comment est-ce que je facilite la gestion des éventuelles réclamations client pour gommer tout irritant et être le plus réactif pour ne pas mettre en péril le business de mon client ?
Enjeux concernant les achats de classes C (Achats non récurrents et non stratégiques) :
En tant qu’entreprise cliente qui fait des achats de classe C, comment est-ce que je peux trouver le fournisseur qui me permet, à mes équipes, mes utilisateurs et moi, d’acheter les produits dont nous avons besoin de la façon la plus simple possible ?
L’enjeu pour l’entreprise « fournisseur » est donc ici de simplifier le parcours client en proposant une expérience proche de ses pratiques dans le B2C en intégrant certaines complexités du B2B.
Avant la création de compte, comment est-ce que je donne accès aux informations concernant mon offre et mes services complètes et facilement intelligible ?
Comment est-ce que j’outille mes commerciaux pour leur permettre d’accompagner les clients avec le bon niveau d’interaction ?
Comment est-ce que je personnalise et humanise le parcours digital du client tout en maintenant le bon niveau de conseil durant son projet d’achat ?
Comment est-ce que je propose les bons services pour accompagner le client à l’installation et l’utilisation de mes produits pour assurer leur satisfaction ?
Comment est-ce que je mets en place le programme de fidélité le plus pertinent pour fidéliser mes clients tout en maintenant le bon niveau de marges ?
Comme le disait notre CEO François dans cet article Le B2B : nouvel Eldorado pour les retailers ? : « C’est la différence entre le monde du shopping (seller side), qui concerne plutôt tout petits clients pros, et le monde du purchasing (buyer side) pour les plus grands comptes”.
Cependant, quel que soit le contexte, on retrouve tout de même quelques grands enjeux communs :
Définir ses personas client pour en décliner la bonne stratégie marketing : plusieurs personnes interviennent dans un parcours B2B. Il faudra bien définir les contours des personas acheteurs, promoteurs, validateurs, etc… en fonction des différents contextes sectoriels de ses clients. Par exemple, un acheteur dans le domaine public aura probablement des spécificités inhérentes à des considérations d’appel d’offres, d’intégration à des plateformes d’achats publiques centralisées, etc… Tout cela nécessite d’avoir une bonne connaissance client
Assurer la livraison des commandes, volumineuses ou pas, selon les modes de livraison préférentiels de ses clients, avec le bon niveau de service et facilitant la réception : une commande dans le B2B, notamment lorsqu’il s’agit d’achats de classes A ou B, n’a pas le même impact qu’une commande dans le B2C. Une commande en souffrance (en retard, produits manquants, etc…) peut avoir des conséquences sur la chaine de production d’une entreprise et mettre en péril son business. Le niveau d’exigence est donc naturellement beaucoup plus fort qu’en B2C et la moindre erreur pour être rapidement pénalisante financièrement voire éliminatoire pour l’entreprise « fournisseur ».
Digitaliser des processus complexes tels que les appels d’offres, les devis, … : l’enjeu pour ces processus n’est pas tant de trouver les bons outils technologiques pour y arriver mais avant tout de savoir structurer, uniformiser autant que faire se peut, les pratiques des équipes. On remarque que bien souvent, les process au sein d’une même entreprise peuvent varier d’un commercial à l’autre, d’une Direction à une autre. La complexité résidant dans la capacité à mettre les équipes dans les bonnes dispositions pour accepter puis contribuer aux évolutions de leurs modes opératoires, que ce soit par réticence au changement ou par manque de temps.
S’intégrer dans les systèmes, souvent disparates, de certains clients : via du punchout, e-procurement, plateforme d’achats d’institutions publiques, etc… Les modes d’intégration peuvent varier d’un client à l’autre mais seront souvent nécessaire pour accélérer le business, mais surtout fidéliser et rassurer au maximum le client sur la capacité d’une entreprise à proposer des solutions avancées et facilitantes.
Maintenir une relation humaine authentique et de proximité dans un environnement digital : malgré le fait que les clients soient toujours plus familiarisés aux interactions numériques dans leurs vies de tous les jours, ils n’en restent pas moins sensibles au contact humain. Surtout quand il s’agit de passer commandes pour des produits nécessaires au bon fonctionnement de leur activité et que cette activité elle-même implique un émotionnel fort avec ses utilisateurs finaux (dans le domaine de la restauration par exemple). Un peu comme quand un particulier effectue un achat engageant dans sa vie privée (bijou, mobilier haut de gamme, etc…).
Se mettre en conformité avec les différentes législations (RGPD, AGEC, facture électronique, etc..) : le B2B n’est pas exempt des différentes réglementations mises en place ces dernières années, que ce soit directement ou indirectement. Cela nécessite parfois des adaptations de l’organisation et de la culture interne qui s’applique également à la façon dont le commerce est fait, numériquement ou non. Par exemple, avec la loi AGEC, beaucoup de clients demandent des garanties quant à la responsabilité et à l’offre de leurs fournisseurs. Cela a des impacts sur toute la chaine de valeur, y compris dans outils digitaux qui doivent s’adapter.
Ces besoins sont souvent dictés par les standards établis par les leaders du secteur, les "best in class". Aujourd’hui, la digitalisation n’est plus une option pour rester compétitif face aux acteurs les plus avancés et les pure players fraîchement arrivés. La montée des Millenials, rompus aux interactions digitales, dans l’ensemble des entreprises, joue également un rôle important dans l’évolution globale des pratiques B2B.
Quelques éléments de réponses à ces enjeux
Pour répondre à ces enjeux, les entreprises doivent apporter des réponses à la fois d’un point de vue fonctionnel, et donc technique, bien évidemment, mais également organisationnel.
Expérience client :
Accès simplifié et omnicanal à son offre personnalisée sur base de son contrat et ses préférences : c’est une spécificité du B2B, il y a parfois autant d’offres qu’il y a de clients. Et bien souvent, au démarrage, ces offres ne sont pas référencées et vivent leur vie dans des fichiers Excel perdus sur des Drives parfois non structurés. Il faut donc tendre vers le maximum de structuration et d’automatisation de la gestion de la donnée de l’offre
Capacité à passer une commande sur différents canaux : si le commercial aura toujours son rôle à jouer, même avec l’avènement de l’IA, encore pour un temps du moins, les clients sont de plus en plus autonomes. Beaucoup savent se renseigner par eux-mêmes, voire souhaitent se renseigner par eux-mêmes, pour éviter les biais commerciaux, et apprécient de plus en plus de pouvoir commander quand ils veulent, et évitant certaines interactions, humaines ou clics, qui ne sont pas nécessaires. Cela s’applique davantage aux achats de classe C mais l’automatisation et l’optimisation des processus de commandes sont attendus quelques soient les typologies d’achats.
Gestion fine de son organisation : autre particularité du B2B, la gestion de l’organisation client. Un client peut avoir plusieurs utilisateurs dans son organisation qui interviennent dans les processus d’achats (utilisateur final, acheteur, responsable achats zone, direction des achats, etc…), à multiplier parfois par le nombre de sites géographiques de l’organisation, etc… Il faut donc penser la gestion des utilisateurs en intégrant cette complexité dans tous les outils (gestion des identités, gestion des droits, ….).
Multiplicité des modes de paiement : des clients qui souhaitent payer le plus tard possible (paiement à 30, 60, jours) et un fournisseur qui préfère avoir les fonds le plus tôt possible (pour lancer sa production, passer commandes à son fournisseur, etc…), voici la dichotomie autour du paiement. Maintenant, il n’en reste pas moins que pour adresser des clients de toutes tailles, il conviendra de proposer un maximum de modes de paiement.
Autres exemples de sujets à traiter : modèle de données souple et adaptable, utilisation de l’IA…
Gestion du commerce :
Gestion électronique des documents : dans le B2B contrairement au B2C, les documents se multiplient. Par exemple, si dans le B2C, il y a des CGV uniques à faire valoir auprès de l’ensemble de ses clients, dans le B2B, il y a un contrat par client, des bons de commandes, des devis, des bons de livraisons, etc… Et idéalement, il faut que toute cette documentation puisse être disponible dans différents formats, incluant différents informations, propres aux différents clients. Et que toutes ces informations, disparates, puissent être aussi structurées afin d’être réutilisées de façon automatisée dans les systèmes de l’entreprise fournisseur mais aussi parfois directement dans les systèmes des entreprises clientes…
Gestion centralisée des leads et clients : la relation commerciale dans le B2B exige une compréhension profonde des enjeux client (secteur, marché, cycles de production, …). Pour ce faire, les commerciaux, au contact avec les clients, doivent être outillés pour avoir le bon niveau de discours et proposer l’offre la plus adaptée qui mènera soit à la contractualisation soit à la fidélisation des clients déjà sous contrat. Pour une forme de clientelling applicable au monde professionnel.
Autres exemples de sujets à traiter : Processus de contractualisation digitalisé et automatisé, programme de fidélité Pro, campagnes commerciales et marketing automatisées et personnalisées, moteur prix et devis avancé, …
Gestion de l’offre et de la supply :
Capacité complète de diffusion des informations (EDI, API, intégration avec plateforme d’e-procurement, etc…) : certains clients B2B, parmi les plus grosses entreprises notamment ou les plateformes publiques d’achats (ex. : UGAP en France et équivalent dans d’autres pays), attendent un niveau d’intégration avancé dans leurs systèmes. Que ce soit pour pousser un catalogue produit depuis son SI ou bien un punchout qui redescend les commandes dans l’ERP du client. Au-delà des interfaces à proposer, il y a également un enjeu de structuration de la donnée pour qu’elle puisse être consommée facilement par les systèmes cibles (hiérarchie, taxonomie, codes références commandes internes / externes, etc…)
Détection automatique des événements liés au cycle de vie produit : afin d’assurer le maintien en conditions opérationnelles de ses clients, une entreprise « fournisseur » doit également mettre en place les outils permettant de piloter le cycle de vie des produits, d’un point de vue global (qualité, fin de vie, sécurité, etc…) mais également du point de vue de l’utilisateur (fin de garantie, nouvelle gamme, baisse des performances, etc…).
Gestion complexe des devis / commandes avec multi-fulfillment : indépendamment des flux logistiques existants ou à mettre en place, les outils devront permettre de gérer des commandes pouvant être expédiées sur différents sites avec différentes méthodes (enlèvement sur un quai, livraison client, etc…) pour une même commande. En incluant la capacité de gérer les spécificités de la remise, proposant les bons documents de livraison adaptés aux attentes du client, … Il faudra que les outils soient donc capables de porter la complexité du split de commandes, du sourcing et des workflows associés. Sans parler des workflows de validation internes aux clients (utilisateur vs acheteur vs validateur, …)
Autres exemples de sujets à supply : gestion omnicanale et temps réel des stocks, gestion avancée et automatisée des prévisions, enrichissement de l’information produit avec les spécificités B2B,…
Pour conclure, quelle situation de marché ?
Une maturité assez disparate
La transformation digitale du commerce dans le B2B suit une trajectoire semblable à celle des retailers ces dix dernières années : elle est avant tout une réponse aux attentes clients et à la pression concurrentielle. Toutefois, elle offre également un potentiel de croissance important, à condition de relever les défis organisationnels et techniques et de mobiliser pleinement les équipes.
Chez ZeTrace, nous observons 3 grandes étapes dans la maturité des acteurs :
Les entreprises au niveau "ceinture jaune" multiplient les initiatives isolées sans coordination globale. Souvent, la digitalisation démarre par l’implémentation du CRM pour essayer de faciliter la vie du Commerce. Les devis sont encore manuels ou très peu digitalisés et les fichiers pullulent. Idem pour les contrats. Cependant, cela répond souvent à la pression immédiate des forces commerciales en frontal client mais cela ne s’inscrit pas dans une approche plus globale et projective. Pour progresser, ces entreprises doivent établir une vision stratégique claire et engager une transformation culturelle profonde. Elles doivent structurer (créer ou adapter) les fondations : processus et référentiels.
Au niveau "ceinture verte", une réelle volonté de transformation se manifeste, souvent dans une logique de rattrapage. Des investissements significatifs sont réalisés, mais l’approche reste centrée sur les outils plutôt que sur le client. A nouveau, on pense aux fonctionnalités à proposer aux équipes métier (facilité la création de devis, de catalogues physiques ou virtuels à présenter au client) sans penser aux attentes client en termes d’efficacité. C’est le début de la mise en place du e-commerce pour certains, avec son lot de défiance. L’erreur ici est souvent de vouloir proposer un site e-commerce sans équipe e-commerce experte pour le faire fonctionner. A côté, les systèmes d’information internes commencent à s’intégrer avec ceux de certains clients plus exigeants. La transformation culturelle est en cours et il faut pousser pour plus de transversalité.
Les "ceintures noires", quant à elles, adoptent une stratégie offensive pour capter des parts de marché. Elles disposent d’un cadre structuré pour l’innovation et d’une dynamique culturelle orientée client. Les fondations (référentiels et processus) sont en place, les fonctionnalités aussi. Elles sont à la recherche de l’optimisation des parcours, de nouveaux services différenciants et innovants pour améliorer le bas de compte. Elles sont peu d’élues et ont mis en place 95% des critères et facteurs listés plus haut.
Et vous ? Où en êtes-vous ?
Chez ZeTrace, nous avons pour mission d’éclairer et d’accompagner nos clients à chaque étape de leur transformation, quel que soit leur niveau de maturité, en définissant avec eux une feuille de route claire, adaptant nos recommandations à leurs besoins spécifiques puis en les épaulant dans la mise en œuvre de cette feuille de route.

Nathanaël Negroni
Principal Consultant