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Hortense Carton
Consultante
Témoignage d’une consultante terrain
Au fil de mes missions auprès d’entreprises variées, grands groupes, marques en transformation, structures agiles, j’ai constaté une réalité fréquente : les roadmaps e-commerce échouent souvent avant même leur mise en œuvre. Ce n’est pas un problème de méthode ou d’outil, mais bien un enchaînement d’obstacles récurrents qui minent la réussite, quels que soient la taille ou le secteur. Voici, à travers mes expériences terrain, les freins majeurs que j’ai rencontrés.
1. Quand l’absence de cadre transforme l’agilité en improvisation
Dans une enseigne de distribution spécialisée (bricolage et maison), les projets étaient souvent pilotés de manière informelle, sur la base de relations de proximité entre prestataires et responsables métiers. Cette approche favorisant l’agilité spontanée aboutissait à des délais irréalistes, des engagements non tenus, et une gestion hors processus. Les initiatives se multipliaient en parallèle des projets IT globaux, sans alignement clair ni priorisation, générant confusion et frustration.
Côté métier, les interlocuteurs étaient très orientés terrain et expérience utilisateur, mais sans vision claire sur le time-to-market ou les arbitrages entre projets. Résultat : tout devenait urgent, mais rien n’était réellement priorisé.
Ce que j’en retiens : l’agilité doit s’appuyer sur un cadre structurant. Une roadmap alignée, partagée et intégrée dans une gouvernance globale évite les silos, le flou des priorités et l’épuisement des équipes.
2. Quand un projet structurant reste en marge de l’organisation
Chez un acteur du retail textile en pleine transition omnicanale, j’ai rejoint une équipe projet pilotant un chantier important organisé en cycle en V, alors que la majorité des équipes fonctionnait en mode agile (feature teams). Ce décalage méthodologique se traduisait par un isolement du projet, absent des rituels collectifs et des instances d’arbitrage, ce qui réduisait sa visibilité et sa priorité.
L’intégration au sein des circuits de décision manquait, rendant la mobilisation des bons interlocuteurs compliquée et ralentissant les avancées.
Ce que j’en retiens : quelle que soit la méthode choisie, la roadmap doit impérativement s’inscrire dans l’écosystème global de l’entreprise, avec un accès aux espaces de décision, de coordination et de priorisation.
3. Quand tout devient prioritaire faute de vision long terme
Pour deux enseignes de mode premium, j’accompagnais le delivery digital en mode agile. Malgré des sprints bien organisés, l’absence de roadmap à moyen terme côté client générait un flux continu d’urgences non hiérarchisées. Les projets étaient souvent initiés en réaction à des décisions de direction, sans cadrage ni validation des impacts.
Notre rôle était de défendre la faisabilité technique et humaine, et de rappeler sans cesse le cadre nécessaire à une collaboration efficace. Sans vision partagée, la dynamique se transformait en micro-crises permanentes.
Ce que j’en retiens : une roadmap doit reposer sur une vision structurée, une anticipation des impacts et une culture de collaboration disciplinée. Sans cela, l’agilité ne suffit pas.
4. Quand la surcharge opérationnelle étouffe la structuration des projets
Dans une entreprise de mode en pleine digitalisation, la faible maturité projet et la charge opérationnelle importante empêchaient la mise en place d’une roadmap réaliste et suivie. Les équipes internes, saturées par le quotidien, ne pouvaient pas cadrer ni prioriser les initiatives. Par ailleurs, l’intégrateur partenaire ne communiquait pas clairement sur les délais, provoquant retards et confusion. Plusieurs projets coexistaient sans distinction claire de priorité, taille ou complexité, et aucun indicateur de performance n’était suivi. Ce que j’en retiens : pour qu’une roadmap soit efficace, il faut alléger la charge opérationnelle, formaliser les processus et mettre en place un suivi rigoureux des indicateurs. Conclusion : les clés pour réussir sa roadmap e-commerce Ces expériences montrent que la réussite d’une roadmap ne tient pas qu’à une bonne volonté ou à la qualité du document final. Plusieurs facteurs sont indispensables : Un cadre structurant et partagé, qui évite improvisations et silos. L’intégration du projet dans l’écosystème global, avec une bonne visibilité et une gouvernance claire. Une vision à long terme, qui permet de prioriser et d’anticiper les impacts. Une maturité projet suffisante, incluant des processus solides et un suivi régulier des indicateurs. Sans ces piliers, même les roadmaps les mieux conçues risquent de rester lettre morte. La construction et le pilotage d’une feuille de route sont donc autant une démarche humaine qu’un exercice stratégique. Accompagner ce changement culturel est la clé pour transformer la roadmap en un levier de succès concret.

Hortense Carton
Consultante